2024.04.03

2024.04.03

La Charte de la langue française dans les milieux de travail au Québec

Le français est la langue officielle du Québec depuis 1975. Puis en 1977, sous la gouverne du premier ministre René Lévesque, une nouvelle Charte de la langue française fut adoptée pour assurer la vitalité, la qualité et le rayonnement de celle-ci au Québec. Plus particulièrement, la Loi 101 est venue préciser l’application concrète de dispositions en faveur du français dans les milieux de travail.

Depuis ce temps, tous et toutes doivent œuvrer à faire du français la langue de l’enseignement, des communications, du commerce et des affaires et les entreprises québécoises doivent généraliser l’utilisation de la langue française afin de faire de celle-ci la langue d’usage normale et habituelle du travail.

En mai 2021, l’Assemblée nationale du Québec a apporté des modifications à la Charte en adoptant la Loi sur la langue officielle et commune du Québec, le français. Cette loi vient renforcer le français au Québec, en apportant la précision suivante dans le préambule de la Charte : « Langue distinctive d’un peuple majoritairement francophone, la langue française permet au peuple québécois d’exprimer son identité ». Du plus, l’article premier de la Loi indique que : « Le français est la langue officielle du Québec. Seule cette langue a ce statut. »

Ainsi, et depuis plus d’un demi-siècle, la FTQ est de tous les combats pour s’assurer de la prédominance du français au Québec et plus particulièrement, dans les milieux de travail. Les transformations numériques actuelles et la mondialisation des échanges économiques nous obligent, encore aujourd’hui, à être vigilants et proactifs dans la défense de ce droit. C’est un enjeu important pour la centrale syndicale, car le français au travail, c’est un droit, final bâton.

En ce moment, nous considérons que nous devons faire face à quatre défis pour assurer le visage français du Québec :

  • La francisation de la société québécoise.
  • La francisation des milieux de travail.
  • La francisation des personnes immigrantes.
  • La francisation à l’échelle mondiale et en Amérique.

Pour la FTQ, le français est la langue officielle et commune du Québec et nous croyons que le Québec doit être tout aussi francophone que les autres provinces du Canada sont anglophones. Cela découle d’un choix qui est inscrit dans l’histoire du Québec et de chacun des provinces du Canada.

Le présent document permet d’approfondir certaines modifications apportées à la Charte de la langue française en 2022, et plus précisément, en ce qui touche les milieux de travail. D’abord nous examinerons les droits linguistiques fondamentaux au Québec. Puis la deuxième section permet de mieux comprendre l’action des travailleuses et travailleurs membres des comités de francisation dans les entreprises qu’ils soient syndiqués ou non. Nous croyons d’ailleurs à une présence syndicale forte et constructive au sein des comités de francisation, car à la FTQ, les comités de francisation constituent un symbole et un instrument syndical des plus important.

LA CHARTE DE LA LANGUE FRANÇAISE ET LES DROITS LINGUISTIQUES FONDAMENTAUX

La Charte de la langue française donne à la population québécoise des droits linguistiques fondamentaux. Il y est précisé dans les premiers articles que toute personne a le droit de recevoir des communications en français de l’Administration (service de santé, services sociaux, les ordres professionnels, les entreprises d’utilités publiques, les établissements d’enseignement supérieur, les syndicats et autres). De même, on y mentionne le droit de s’exprimer dans une assemblée délibérante en français, d’être informés et servi en français dans les commerces, de recevoir un enseignement en français et d’avoir droit à une justice et une législation en français.

L’article 4 de la Charte quant à lui donne une portée générale à son application dans les milieux de travail en y affirmant que « les travailleurs ont le droit d’exercer leurs activités en français ».

Il incombe aux travailleurs et travailleuses de faire respecter sur leurs lieux de travail ce droit inscrit à l’article 4, tout comme il revient aux citoyens et citoyennes du Québec de faire respecter leurs droits dans la société.

Pour respecter ces droits fondamentaux, la FTQ revendique toujours que :

  • Les institutions gouvernementales doivent avoir les moyens pour s’assurer du visage français du Québec et que l’État joue un rôle exemplaire en ce domaine.
  • Toute loi québécoise doit être interprétée dans le respect des droits visant à protéger d’abord la langue française.
  • Des comités de francisation devraient être mis en place dans les entreprises de 25 employés.ées et plus ainsi que dans les municipalités, les institutions scolaires et de santé.
  • Le gouvernement du Canada doit s’assurer que les employées et employés fédéraux francophones puissent vraiment travailler dans leur langue.

Immigration et apprentissage du français

La nouvelle Charte de la langue française apporte un nouveau droit linguistique fondamental à savoir le droit à l’apprentissage du français. On y stipule d’ailleurs que le français est la langue commune et la langue d’intégration.

Pour la FTQ, le défi de la francisation des personnes immigrantes constitue un enjeu syndical et de société très important. Le film Langue à l’ouvrage -Migrer vers le français au travail produit en 2020 par la FTQ, grâce à la contribution financière de l’OQLF, a permis de mieux documenter cette question et d’approfondir le rôle que peuvent jouer les militantes et les militants syndicaux.

Pour visionner le film : https ://ftq.qc.ca/langue-a-louvrage/

LA FRANCISATION DES ENTREPRISES ET LA LANGUE DU TRAVAIL

Les articles 41 à 49 de la Charte sont extrêmement importants quant au respect des droits fondamentaux dans les milieux de travail (langue de communication, exigences linguistiques lors de mouvements de personnel et d’embauche, dans la rédaction de contrat individuel de travail, pour informer sur les conditions de travail). Ces articles de la Charte sont partis intégrants de toute convention collective.

Ainsi, dans une entreprise syndiquée, tout manquement par l’employeur à ces dispositions de la Charte est contestable, « grieffable », par un syndicat selon la procédure de griefs prévue à la convention collective.

Toute communication écrite, y compris sous forme d’affichage ou par voie électronique, adressée par l’employeur ou l’un de ses représentants hiérarchiques à l’ensemble du personnel, pourvu qu’elle ait une incidence sur le lien contractuel unissant l’employeur et les salariés, doit ainsi être en français. Ce sont, par exemple, les communications ayant trait aux conditions d’embauche, de mutation, de promotion, de rétrogradation, de suspension ou de mise à pied, les communications relatives aux conditions de travail et de rémunération, les avantages sociaux, les assurances, les régimes de retraite, etc.

Cependant, rien n’oblige un cadre d’une entreprise à parler français à son personnel. Un employeur ne peut invoquer le fait qu’un salarié ne connaît pas ou ne comprend pas une langue autre que le français pour affecter les droits dudit salarié. Il ne peut exercer non plus de représailles à l’endroit d’un membre de son personnel du seul fait qu’il a exigé le respect de son droit de travailler en français.

Une chose est certaine, un employeur doit assurément utiliser une langue comprise par ces interlocuteurs, en l’occurrence, le français s’il veut se faire comprendre ou préserver un environnement de travail sain, notamment pour garantir un milieu sécuritaire et exempt, le plus possible, de malencontreux accident de travail.

Les dispositions de la Charte s’appliquent dorénavant à toutes les entreprises, peu importe qu’elles soient de compétences québécoises ou fédérales. Qui plus est, dès 2025, les entreprises de 25 à 49 personnes (toute catégorie confondue : employés, cadres et membres de la direction) devront elles aussi détenir un certificat de francisation émis par l’Office québécois de la langue française.

La nouvelle Charte de la langue française donne le droit à tous les travailleurs et travailleuses du Québec de gagner leur vie en français.

L’article 46 de la Charte encadre maintenant les exigences relatives à la connaissance d’une autre langue que le français à l’embauche. En effet, un employeur pourrait être appelé à démontrer la nécessité d’une telle exigence en évaluant les besoins réels linguistiques associés aux tâches concernées, en assurant que d’autres membres de son personnel ne possèdent pas déjà les connaissances linguistiques requises et en veillant à limiter à l’essentiel le nombre de postes requérant de telles compétences (art.46.1).

L’objectif de cet article de loi est de répondre à cette « nouvelle norme », qui consiste à exiger pour tous et toutes un bilinguisme tous azimuts et trop souvent… sans accent en prime. L’exigence de la connaissance d’une autre langue que le français pour l’accès à un poste étant devenue chose trop courante, la loi vise à renverser cette tendance.

Bref, l’article 46 vient interdire à un employeur d’exiger d’une personne, pour qu’elle puisse rester en poste ou y accéder, notamment par recrutement, embauche, mutation ou promotion, un niveau de connaissance spécifique d’une langue autre que la langue officielle, à moins que l’accomplissement de la tâche ne nécessite un tel acquis. Même alors, il doit, au préalable, avoir pris tous les moyens raisonnables pour éviter d’imposer une telle exigence.

En résumé, si un employeur souhaite ou exige la maîtrise d’une autre langue que le français pour un poste, il devra en démontrer la nécessité en évaluant les besoins linguistiques associés aux tâches concernées, en s’assurant que d’autres membres de son personnel ne possèdent pas déjà les compétences requises et en veillant à limiter à l’essentiel le nombre de postes requérant de telles compétences (art. 46.1).

L’article 45 de la Charte de la langue française précise plusieurs interdictions pour les employeurs quant au droit de travailler en français et à la démarche de faire respecter ces droits. En effet, il est interdit à un employeur de congédier, de mettre a pied, de rétrograder ou de déplacer un membre de son personnel, d’exercer à son endroit des représailles ou de lui imposer toute autre sanction pour la seule raison que ce dernier ne parle que le français ou qu’il ne connaît pas suffisamment une langue donnée autre que la langue officielle pour l’une ou l’autre des raisons suivantes :

  • parce qu’il a exigé le respect d’un droit découlant des dispositions de la Charte ou pour le dissuader d’exercer un tel droit;
  • parce qu’il n’a pas la connaissance ou un niveau de connaissance spécifique d’une autre langue que la langue officielle alors que l’accomplissement de la tâche ne le nécessite pas;
  • parce qu’il a participé aux réunions d’un comité de francisation institué en vertu de l’article 136 ou de l’article 140 ou d’un sous-comité créé par celui-ci ou parce qu’il a effectué des tâches pour eux;
  • parce qu’il a, de bonne foi, communiqué à l’Office un renseignement en vertu de l’article 165.22 ou collaboré à une enquête menée en raison d’une telle communication.

En outre, le gouvernement a introduit un nouvel article qui prévoit pour les salariés, le droit à un milieu de travail sans harcèlement ou discrimination en lien avec des enjeux linguistiques (art.45.1). Un salarié peut même déposer une plainte s’il se considère victime « de harcèlement linguistique ». Tout comme les autres formes de harcèlement, un employeur doit prendre les moyens raisonnables pour prévenir ce type de conduite et, lorsqu’une telle conduite est portée à sa connaissance, la faire cesser.

Les entreprises qui sont assujetties à un processus de francisation en vertu de l’art. 141, c’est-à-dire les entreprises de 50 employés.ées et plus (25 personnes et plus à compter de 2025), doivent respecter des dispositions sur la généralisation de l’utilisation du français à tous les niveaux de l’entreprise. Ce qui consiste, entre autres, à mettre à la disposition du personnel des documents et des outils de travail en français, ainsi que celle d’utiliser le français dans les technologies de l’information. Les machines et équipements sont donc inclus dans cette disposition, par exemple, un ordinateur ou un logiciel est un outil de travail fourni aux membres du personnel à la discrétion de l’employeur, au même titre qu’un photocopieur, un appareil ou un équipement quelconque.

Dans une entreprise assujettie au programme de francisation, l’employeur est tenu de mettre à la disposition de son personnel la version française de tout logiciel d’utilisation courante, que ce logiciel a été acheté dans le commerce ou qu’il s’agit d’une application maison.

La loi ne prévoit pas expressément que la formation offerte aux salariés se doit d’être en français. Cependant, lorsqu’il existe un programme de francisation, le droit de travailler en français est mieux encadré, et se traduit par la mise en place d’un ensemble de mesures visant à généraliser l’usage du français dans le milieu de travail.

Il est important de rappeler que les articles 41 à 49 sont réputés faire partie de la convention collective et leurs violations par l’employeur sont matière à grief. Il est de la responsabilité du syndicat de défendre ces droits et d’enclencher le processus de grief comme pour tout autre droit prévu. L’arbitre a les compétences pour entendre les causes et rendre des sentences en cette matière.

Dans un milieu non syndiqué, c’est la CNESST qui peut entendre ce genre de contestations. Le salarié qui souhaite faire valoir ses droits en vertu des articles 45 et 46 peut en effet porter plainte auprès de la Commission.

La Charte de la langue française prévoit que les conventions collectives et leurs annexes doivent être rédigées en français. Elles doivent même être disponibles en français dès leurs conclusions. En plus, la Charte de la langue française oblige aussi depuis 2022 la publication d’une version française certifiée de la sentence arbitrale à la demande d’une partie. Les frais sont assumés par les deux parties.

Les syndicats doivent eux aussi utiliser le français dans leurs communications écrites et orales avec leurs membres. Ces communications peuvent être dans une langue autre que le français, lorsqu’utilisées avec un membre en particulier, si cette personne lui en a fait la demande.

Par « communications écrites », on entend toute correspondance adressée à l’ensemble des membres d’une association de salariés ainsi que tout imprimé accompagnant cette correspondance, y compris les revues, journaux et bulletins d’information publiés par les associations de salariés à l’intention de leurs membres.

Les récentes modifications à la Charte de la langue française ont rendu obligatoire la publication d’une version française des statuts et règlements du syndicat et de ses états financiers. Cette publication doit être accessible dans des conditions aussi favorables.

LA CHARTE DE LA LANGUE FRANÇAISE ET LES COMITÉS DE FRANCISATION

Comme nous l’avons mentionné précédemment dans la section « La Charte de la langue française dans les milieux de travail au Québec », l’employeur a plusieurs obligations afin de maintenir le français comme langue du travail :

  • Obligation de franciser son personnel et ses activités.
  • Obligation de veiller à la permanence de la francisation.
  • Obligation d’informer son personnel sur la progression de la francisation.

Si l’entreprise doit mettre en place un programme de francisation, elle doit donc s’engager dans un processus à plusieurs étapes qui conduit à l’obtention d’un certificat de francisation et qui vise ultimement à assurer l’implantation du français de manière durable (art 139 et suivants).

Dans un tel cas, l’ensemble des membres du comité de francisation sont appelés à jouer un rôle important dans cette mise en place.

Une des particularités de la Charte de la langue française depuis 1977 est la mise en place d’une structure de collaboration employeurs – travailleurs dans la gestion de la langue française dans les entreprises de 100 personnes et plus (cadres et personnel de direction compris). Ainsi, les travailleurs et les travailleuses ainsi que la direction des entreprises doivent agir en commun pour définir le contenu du programme de francisation et pour s’assurer de la mise en application de ce programme.

La participation à titre de membre syndiqué d’un comité de francisation est essentielle pour faire en sorte que les objectifs de la Charte deviennent une réalité dans les activités quotidiennes des milieux de travail.

Ainsi, les entreprises employant 100 personnes ou plus doivent appliquer les obligations suivantes :

  • Mettre en place un comité de francisation dans l’entreprise;
  • Désigner un responsable de l’entreprise pour s’occuper du comité de francisation et comme représentant auprès de l’Office et informer le personnel de la composition du comité de francisation;
  • Désigner l’un de ses membres, parmi ceux qui représentent les travailleurs, pour agir avec le représentant désigné par la direction comme représentant de l’entreprise auprès de l’Office ;
  • Diffuser le nom des représentants au comité de francisation auprès des membres de son personnel ;
  • Remettre à l’OQLF des rapports sur la mise en œuvre de son programme tous les 12 mois.

Rappelons que lorsqu’on parle du nombre d’employés dans une entreprise on doit inclure l’ensemble des personnes qui y travaillent : cadres, employés.ées de bureau et de production, personnel à distance, et sur la route, etc. Lorsqu’une entreprise possède plusieurs lieux de travail ou d’établissements, on doit considérer qu’il s’agit d’une seule entreprise.

Les amendements apportés à la Charte de la langue française ont clairement établi la volonté de rendre permanent le travail des comités de francisation, et donc de la mission des personnes qui y siègent. Cela illustre une conviction largement partagée, indiquant que la francisation des entreprises au Québec demeure importante aux yeux du législateur.

Dans les faits, le législateur a souhaité mieux encadrer le rôle des comités de francisation avec la Loi sur la langue officielle et commune du Québec, le français, mise en place en 2022. L’article 138.1 de la Charte est venu clarifier les responsabilités du comité de francisation.

Le comité de francisation doit notamment:

  • Désigner, en vertu du deuxième alinéa de l’article 139.1, un représentant des travailleurs et travailleuses auprès de l’Office ;
  • Voir à la réalisation de l’analyse de la situation linguistique, y compris la rédaction du rapport qui en fait état ;
  • Voir à l’élaboration du programme de francisation que l’entreprise doit adopter, en surveiller la mise en œuvre et, s’il y a lieu, voir à la rédaction du rapport sur ce sujet visé ;
  • Veiller, lorsque l’entreprise possède un certificat de francisation émis, par l’OQLF, à ce que l’utilisation du français demeure généralisée au sein de l’entreprise ainsi que participer à la rédaction du rapport triennal ;
  • Donner son avis, à la demande de la direction de l’entreprise, sur la pratique de l’employeur d’exiger la connaissance ou le niveau de connaissance spécifique d’une autre langue que la langue officielle d’une personne pour rester en poste ou y accéder et sur les moyens prit pour éviter d’imposer une telle exigence.

Le comité peut aussi créer des sous-comités pour l’assister dans l’exécution de ses fonctions.

De plus, la direction de l’entreprise doit permettre la participation du comité aux activités visant à informer le personnel de la mise en œuvre de tout programme de francisation ou de l’évolution de l’utilisation du français dans l’entreprise.

Les membres sont d’ailleurs libérés de leur travail sans perte de salaire pour assister aux rencontres.

Depuis plus de 50 ans, les revendications syndicales pour une présence plus importante de la langue française dans nos milieux de travail sont inspirantes voir déterminantes dans la réussite de ce processus. Plusieurs de nos demandes ont permis des avancées pour la conduite des travaux de ces comités de francisation. Parmi celles-ci figurent :

  • L’obligation de signatures de tous les membres des comités de francisation pour les différents rapports soumit à l’OQLF, et ce sans exception ;
  • L’obligation de désigner un ou une responsable représentant le personnel de l’entreprise ;
  • L’obligation pour l’employeur de rédiger un procès-verbal pour chacune de ses réunions auxquelles tous les membres du comité doivent y apposer leur signature. Ce procès-verbal est aussi transmis à l’OQLF, permettant ainsi au conseiller attitré au dossier de prendre connaissance des échanges au sein du comité et même d’y assister le cas échéant.

Par cette obligation, on vient souligner toute l’importance du travail des membres du comité de francisation. L’Office peut communiquer avec un membre du comité pour s’enquérir des motifs pour lesquels une personne n’a pas signé un document (art. 138.4). En tant que personnes représentant les travailleurs.es, nous comprenons que notre signature est un élément en lien avec notre rapport de force et que nous ne devons signer que des documents avec lesquels nous sommes entièrement en accord.

Le comité de francisation est ainsi au cœur de la démarche de francisation dans les entreprises de 100 employés.es et plus et bien sûr dans l’obtention et le maintien de sa certification. L’importance de ce comité et la nécessité de la présence de personnes représentant les travailleurs.es ne sont donc plus à démontrer. Il nous est ainsi possible de comprendre pourquoi la FTQ souhaite que le seuil minimal pour la création d’un comité de francisation soit diminué à 50 employé.es.

La loi prévoit un rôle important aux travailleurs.es de ce comité pour notamment faire respecter leurs droits en matière de francisation des milieux de travail et comme acteur de la certification des entreprises. C’est pourquoi, en tant que syndicat, nous devons réfléchir pour déterminer les façons dont nous voulons agir afin de faire respecter ces droits dans le milieu de travail, mais aussi au sein des comités de francisation, et ce, en fonction des valeurs qui nous animent comme syndicalistes.

Le comité de francisation doit tenir une réunion au moins une fois tous les six mois. Les autres membres du comité sont nommés par la direction, et sont généralement des cadres ou des professionnels. Certains comités de francisation ont cependant fait plus de place aux représentants des travailleurs et travailleuses. Aucun article de la Charte n’empêche une telle décision.

Pour nous, il y a 4 fonctions essentielles à jouer pour un membre d’un comité de francisation :

Une des améliorations importantes est la fonction de représentants des travailleurs et des travailleuses, nommé aussi co-porte-parole.

Comme mentionné précédemment, la Loi prévoit que le comité de francisation doit désigner un deuxième représentant auprès de l’Office provenant des travailleurs.es (art.138.1 et 139.1).

Au-delà de cette désignation, la Loi prévoit que « l’un et l’autre de ces représentants doivent se tenir réciproquement informés des communications entre l’entreprise et l’Office ». Idem pour l’Office qui doit s’assurer qu’ils soient tous deux informés de ses communications avec l’entreprise. (Article 138.1)

Un gain important pour les travailleurs.es et pour la francisation des entreprises.

Le comité de francisation est un lieu où toutes les personnes qui y siègent sont égales, c’est-à-dire que la parole d’une personne représentant les travailleurs.es a autant de valeur que la parole d’un patron. Le comité de francisation constitue ainsi le canal par lequel les syndicats peuvent être informés du processus de francisation et l’influencer, d’où son importance dans la vie syndicale.

Cependant, la francisation des entreprises, la protection et l’accroissement de notre droit à travailler en français nécessitent un engagement plus massif que celui des seuls membres des comités de francisation. Le travail de ceux-ci doit donc être enraciné dans nos réalités syndicales, et s’accompagner d’animation et de mobilisation pour l’ensemble des affiliés.

L’article 137 de la Charte explique les modalités de désignation des travailleurs.es au sein des comités de francisation. On y précise notamment que la moitié des membres du comité doivent représenter les travailleurs.es de l’entreprise.

S’il y a dans une entreprise un ou des syndicats qui représentent la totalité des travailleurs.es, la nomination des représentants.es au comité de francisation relève automatiquement des syndicats. La Charte de la langue française laisse à la discrétion des syndicats la façon de choisir ses représentants au comité de francisation; ce qui peut être fait par élection dans une assemblée générale ou dans une réunion de délégué.es. Les représentants.es peuvent également être nommés par l’exécutif de la section locale.

Dans le cas où le ou les syndicats ne représentent pas la totalité des travailleurs.es du milieu de travail, la logique veut que l’on respecte les proportions de représentation de ces personnes. Cependant, il n’y a rien de précis d’inscrits dans la loi. Par exemple, si le syndicat représentant les travailleurs.es de l’usine représente 66 % des personnes salariées et que le personnel de bureau (syndiqués ou non) représente l’autre tiers, la logique veut qu’il y ait deux personnes représentant l’usine et une personne provenant du bureau.

De plus, la loi prévoit que lorsqu’il n’y a pas de syndicat, les personnes représentant les travailleurs.es sont élues par l’ensemble du personnel de l’entreprise, suivant les modalités déterminées par la direction de l’entreprise, après avoir consulté l’Office.

Pour bien jouer votre rôle syndical au sein du Comité de francisation, il est évident qu’il faut se préparer. Faire de la lecture, effectuer des recherches, d’approfondir des suggestions, discuter avec vos membres et, selon les mandats qui vous ont été confiés par le Comité, accomplir les tâches requises dans la concrétisation du plan d’action du Comité.

Pour ce faire, vous pourrez compter sur l’article 137.1 de la Loi qui confère, sans perte de salaire, le temps nécessaire pour effectuer toute tâche requise par le comité. De plus, il est interdit à un employeur d’imposer toute sanction dans l’acquittement des responsabilités syndicales.

La formation Action syndicale en francisation offerte par la FTQ permet d’approfondir la compréhension du rôle des membres des comités de francisation. Elle permet notamment aux participants.es d’échanger entre eux sur leurs expériences et de se donner différents moyens pour arriver à leurs objectifs. Nous vous invitons à vous inscrire.

Vous trouverez ci-dessous quelques propositions provenant de l’expérience de membres des syndicats affiliés qui pourrait vous permettre d’assumer efficacement votre rôle au sein du comité de francisation :

  • Informer l’ensemble des travailleurs et travailleuses des noms des membres du comité de francisation et les inviter à soumettre leurs questions et leurs suggestions pour le bon fonctionnement du comité.
  • Informer l’employeur par courriel ainsi que l’OQLF de qui représente désormais les travailleurs au sein du comité de francisation.
  • S’informer sur les règles de fonctionnement du comité de francisation, s’il y en a.
  • Demander une copie des plus récents comptes-rendus des réunions du comité.
  • Prendre connaissance, s’il y a lieu :
  1. de l’analyse linguistique la plus récente;
  2. du programme de francisation;
  • du dernier rapport de mise en œuvre;
  1. du dernier rapport triennal;
  2. du dernier plan d’action ayant suivi la dernière validation du rapport triennal;
  3. voir s’il y a une entente particulière, en obtenir une copie ou demander des précisions sur leur portée;
  • de la politique d’embauche de l’entreprise et de sa politique d’achat auprès des fournisseurs ;
  • de sa politique d’utilisation en français des technologies de l’information ;
  • Demander à l’employeur du temps pour vous familiariser avec le dossier ;
  • Effectuer, au besoin, des tournées de l’usine et des milieux de travail ;
  • Identifier les problèmes de francisation qui sont spécifiques à votre milieu de travail, notamment si certaines décisions du comité de francisation ne sont pas mises en application ou qu’elles ne s’accompagnent pas de gestes concrets par la direction ;
  • Inscrire sa dissidence si l’on refuse de signer les documents produits par l’employeur dans le cadre du comité de francisation et en faire part à vos dirigeants syndicaux locaux ;
  • Informer les membres de notre unité syndicale et de votre exécutif local s’il y a lieu, de la teneur de nos travaux au sein du comité de francisation ;
  • Participer aux rencontres annuelles de la FTQ, des comités de francisation et aux tables sectorielles existantes afin d’améliorer notre compréhension des enjeux linguistiques au travail et dans la société québécoise ;

 

À titre de représentant.e syndical.e, nous vous invitons à faire un bilan de la situation du français dans votre milieu de travail et d’en discuter avec les dirigeants.es de la section locale du syndicat. Voici ci-dessous, d’autres idées pour animer son milieu et à la nécessité de l’utilisation d’une langue commune à savoir le français :

 

  • Identifier des pistes d’amélioration et proposer des moyens d’action et de promotion ;
  • Trouver des manières de parler de la francisation dans les activités courantes de l’entreprise ;
  • Mettre sur pied une structure syndicale locale de francisation ;
  • Collaborer avec le comité de santé et de sécurité du travail dans une perspective d’assurer la présence du français sur les machines ou autres lieux qui pourraient s’avérer dangereux ;
  • Fournir aux employés de l’entreprise des idées et conseils de ce qu’ils peuvent faire individuellement pour contribuer à l’utilisation du français dans le milieu de travail ;
  • Parler du français et de son utilisation au travail aux nouveaux employés lorsque vous les rencontrez pour leur parler du syndicat ;
  • Informer les membres de la section locale de l’évolution du dossier de la francisation des entreprises en ajoutant un point à l’ordre du jour de vos assemblées ;
  • Afficher l’information sur le babillard, le journal et le site Web du syndicat, etc. ;
  • Insister, lors de la négociation collective, pour inclure dans la convention les dispositions de la Charte qui touchent la langue du travail ;
  • Convenir avec l’employeur de la liste des postes pour lesquels on exige une autre langue que le français et, si possible, insérer cette liste dans la convention collective ou dans une lettre d’entente.
  • Soumettre un grief ou une demande de médiation à l’Office lors de la violation du droit de travailler en français ;
  • Organiser des cours de français en milieu de travail pour les membres qui n’ont pas de connaissance fonctionnelle en français et s’informer des services du ministère à ce propos ;
  • Revendiquer que les cours de francisation se fassent sur les lieux de travail, et ce sans perte salariale afin de favoriser l’inclusion des personnes issues de l’immigration.
  • Encourager vos membres à suivre les formations et conférences en francisation de la FTQ.

 

Pour aller plus loin…

 

  • Souligner la Semaine du français en mars de chaque année en commandant du matériel promotionnel au Service de la francisation de la FTQ ;
  • Utiliser le site Internet de votre syndicat pour parler du français au travail ;
  • Entretenir une chronique linguistique dans votre journal local (par exemple : une chronique portant sur la terminologie des conventions collectives) ;
  • Et bien évidemment suivre les activités du Service de la francisation de la FTQ.

Outre la formation Action syndicale en francisation, le Service de la francisation de la FTQ a innové en créant ces dernières années, les Conférences Fernand-Daoust sur le droit de travailler en français.

Afin de mieux connaître les enjeux historiques et contemporains du dossier linguistique, ces 4 conférences virtuelles permettent d’échanger sur la question du droit de travailler en français.

La première conférence, qui se tient au début de l’automne, aborde la question de la mobilisation historique et syndicale entourant le français comme langue du travail. Puis, la deuxième, au début du mois de décembre, traite de la mobilisation actuelle au sein des comités de francisation. Nous invitons à chaque occasion un membre de comité à présenter la réalité de son milieu de travail. La troisième conférence, en février, permet de discuter des enjeux liés à la francisation des personnes immigrantes en emploi, en y présentant des extraits du film Langue à l’ouvrage – Migrer vers le français au travail. Finalement, la quatrième conférence aborde des sujets liés aux nouveaux défis de la francisation, par exemple la numérisation de la culture ou du travail, l’obligation de fréquentation des cégeps francophone, etc.

Ces conférences sont ouvertes à tous et à toutes. Pour connaître les dates de ces conférences, consultez la page Web de la FTQ : www.ftq.qc.ca

Le Service de la francisation peut également participer à des ateliers ou à des présentations auprès de syndicats affiliés à la FTQ.

La rencontre annuelle des comités de francisation de la FTQ, qui se tient pendant la semaine du français au travail au mois de mars, est aussi pertinente pour mieux saisir les enjeux de la question linguistique. Des experts en langue française et des militants.es de la langue française sont ainsi appelés à débattre de ces enjeux.

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