Mot des personnes dirigeantes


Journée de réflexion sur les nouvelles droites

Partout dans le monde, nous observons une montée inquiétante de discours et de partis politiques qui misent sur la division, l’intolérance, la haine de l’autre, et qui affichent souvent un mépris pour les normes démocratiques. Les droites radicales gagnent du terrain. États-Unis, Allemagne, Suède, France et plusieurs autres pays sont confrontés à ce phénomène.

Le Québec et le Canada n’y échapperont pas.

En dépit de certaines différences, en lien avec le contexte national ou le style politique, ces droites partagent plusieurs points en commun. Leurs revendications s’appuient sur l’exclusion et portent sur l’immigration, les wokes, l’identité de genre et le nationalisme. Qu’est-ce qui explique cette progression depuis plusieurs années? Quelles sont les menaces pour le mouvement syndical et comment celui-ci peut-il se mettre en action pour les combattre? Depuis plusieurs mois, la FTQ travaille sur ces questions et tiendra une journée de réflexion sur le sujet à Montréal le 13 mai.

Consœurs et confrères,

Nous sommes profondément préoccupés par le vent de droite qui souffle un peu partout dans le monde et particulièrement dans les pays démocratiques. Qu’on les qualifie d’extrêmes, de radicales, de dures, de populistes, d’ultranationalistes, de réactionnaires, de fascistes, ou d’identitaires, toutes ces nouvelles droites ont gagné du terrain à une vitesse exponentielle. Il s’agit d’un phénomène mondial et le Québec n’est pas à l’abri de ces tendances.

Aux États-Unis, l’ex-président Donald Trump pourrait reprendre le pouvoir en novembre prochain malgré une tentative de coup d’État et des discours d’une violence inouïe. L’Italie est gouvernée par un parti aux racines néo-fascistes. En France, le Rassemblent national est en haut des sondages et plusieurs sont d’avis que Marine Le Pen pourrait accéder à la présidence du pays en 2027. En Allemagne, Alternativ für Deutschland (AfD) obtient environ 20% des intentions de vote alors que des cadres de ce parti ont élaboré un plan de déportation des populations issues de l’immigration (même pour les citoyens et les citoyennes) en collaboration avec des néonazis. Dans plusieurs autres pays, comme la Suède, le Portugal, l’Autriche, les Pays-Bas ou la Belgique, les nouvelles droites ont fortement progressé. Il faut le reconnaître, ces partis politiques ont été extrêmement habiles pour canaliser la colère d’une partie de la population, en particulier de la classe ouvrière, et incarner le changement social. Les nouvelles droites jouent donc sur le même terrain que les syndicats et obtiennent parfois davantage de succès.

Mais surtout, ces nouvelles droites ont réussi à normaliser et même légitimer des idées et des discours qui auraient été tout simplement inacceptables il y a 10 ou 20 ans. Dans l’espace public, on évoque sans gêne des théories d’extrême droite comme le grand remplacement. Certains n’hésitent pas à désigner les personnes immigrantes comme les seules responsables de la crise du logement ou des enjeux de criminalité. Les attaques sont de plus en plus virulentes contre les wokes qui seraient à l’origine d’à peu près tous les problèmes au Québec. Une frange du nationalisme québécois se veut malheureusement de plus en plus conservatrice et repliée sur elle-même. Au cours des dernières années, nous avons entendu des propos indignes provenant de la classe politique québécoise. Les voix antiféministes, anti-trans, xénophobes progressent fortement. De telles idées n’ont rien d’inoffensif : elles déstabilisent la société québécoise et mènent à davantage de haine et de violence sur le terrain.

Ces constats sont durs et la situation n’est pas rose, mais il ne faut surtout pas céder au désespoir. Nous pouvons et nous devons faire quelque chose.

Heureusement, ces nouvelles droites ne sont pas aussi bien implantées au Québec qu’ailleurs dans le monde. Cependant, leur influence va en grandissant et les syndicats ont la responsabilité de leur faire barrage. Lors de son dernier Congrès, la FTQ s’est positionnée clairement contre la montée de ces nouvelles droites dont les valeurs sont aux antipodes des nôtres. Nous espérons que cette journée de réflexion sera l’occasion de se mettre en action. Les prochaines années seront déterminantes pour l’avenir de notre mouvement et pour celui de la société québécoise.

Solidairement,

Magali Picard, présidente de la FTQ

Denis Bolduc, secrétaire général de la FTQ